Venant,
ainsi qu’il se plaisait à l’affirmer, d’une lignée paysanne,
Willy BAL naît à Jamioulx en 1916. Son père est employé de
banque. Sa mère tient une petite ferme. Il fréquente l’école de
son village, puis le Collège des Jésuites à Charleroi. A 17 ans,
il entre à l’ Université catholique de Louvain pour y suivre les
cours de philologie romane. Il s’insère activement dans la vie
universitaire, occupe la tribune du cercle de Culture wallonne dont
il est un des animateurs. Déjà lauré pour un recueil « Oupias
d’avrî »
publié en 1935, Willy Bal signe des éditoriaux dans la revue Terre
wallonne qu’animent
Elie Baussart et Arsène Soreil. Il devient même chroniqueur
dialectal à l’INR.
C’est
avec un mémoire de fin d’études consacré à la
« Morphologie
du parler
de Jamioulx » qu’il
obtient, brillamment , en juillet 1937, le titre de licencié en
philologie romane. De 1937 à 1938, il travaille à mi-temps comme
bûcheron tout en rédigeant une thèse sur le patois de Jamioulx qui
lui confère bientôt le titre de docteur. Ce travail sera couronné
par l’Académie de langue et de littérature française . Une
partie sera publiée en 1949 sous le titre:
Lexique du parler
de Jamioulx.
En
1938, c’est le service militaire hélas prolongé par la
mobilisation. Lors de la campagne de mai 40, Willy Bal, adjudant
chef, se retrouve à la tête de son peloton, en première ligne sur
la Lys. Fait prisonnier, il est dirigé vers l’Allemagne où il
devient, selon ses dires et pendant cinq longues années, « une
unité dans un inventaire, une tête de bétail dans un cheptel, une
pièce dans un assemblage ». Rentré au pays en 1945, il est
encore renvoyé Outre-Rhin en qualité d’officier de l’armée
d’occupation.
Enfin,
vient mai 46 et sa désignation à l’ Ecole Prince Baudouin de
Marchin. Avec son épouse, il exploite alors une petite ferme «
ène vréye cinse come
il-a pléji a dîre , nin
ène « fermette » come vos pourîz l’
comprinde,ôdjoûrdu, ène vréye cinse, avou dès vréyès bièsses,
dès vatches, dès gades , dès bèdots, dès lapins èt dès
pouyes a noûri èy’ a stièrni .Ène cinse
où il pratique la culture et l’ élevage tout en menant de front
ses activités de professeur , de chercheur, d’écrivain dialectal
et de père d’une famille nombreuse
: ène vréye nitéye di
quate gamins èt trwès fîyes.
En
1948, il devient membre de la Commission royale de Toponymie et de
Dialectologie; en 1953, membre titulaire de la Société de Langue et
de Littérature wallonne.
Son inlassable activité littéraire et scientifique lui vaut d’être désigné, en 1956, en qualité de professeur de philologie romane à l’Université Lovanium de Léopoldville. « Très vite, Willy Bal se rend compte que la philologie romane , en Afrique, ne devait en aucun cas faire l'objet d'un enseignement similaire à celui qui était pratiqué en Europe et ceci l'a conduit à s'intéresser aux langues africaines ainsi qu'aux premiers textes qui concernaient le Congo, des textes en portugais puisque les premiers explorateurs de cette partie du continent africain venaient du Portugal.Son abondante bibliographie scientifique témoigne d'ailleurs de son intérêt pour ces nouvelles préoccupations philologiques.
Durant
une dizaine d’années, il va animer cet établissement, avant de
revenir en Belgique, à l’UCL où il sera chargé du cours de
linguistique romane.
Nommé
professeur ordinaire en 1966, il devient deux ans plus tard doyen de
la Faculté de philosophie et lettres . En 1970, il est nommé
vice-président du Conseil académique de l’ UCL , poste qu’il
conservera jusque en 1973. Entre-temps,
le 9 novembre 1968, il est élu, au titre philologique, membre de l’
Académie de langue et de littérature françaises dont il deviendra
le président , en 1975.
En
septembre 1984, alors qu’il s’est fixé définitivement à
Jamioulx, son village natal, où il occupe la maison de ses parents,
Willy Bal est admis à
l’ éméritat. Dès lors, il peut non seulement s’adonner à des travaux manuels de jardinage, d’élevage et de bûcheronnage, mais également à des recherches dialectologiques et, surtout, à l’ écriture.
l’ éméritat. Dès lors, il peut non seulement s’adonner à des travaux manuels de jardinage, d’élevage et de bûcheronnage, mais également à des recherches dialectologiques et, surtout, à l’ écriture.
L’
oeuvre de Willy Bal est abondante et variée. Elle s’articule avant
tout autour de la poésie dialectale qui a été et reste l’élément
moteur de sa production. Après Oupias
d’avrî, qui lui
avait valu d’être remarqué
et lauré alors qu’il n’avait que 17 ans, sont venus entre
autres un essai »Èl
région dins l’
monde »;
« Au
soya dès leus,
: des vers sauvages dont la secrète amertume ne parvient pas à
troubler la fraîcheur ;
« Nos n’
pièrdrons nin »,
écrit au coeur de l’hiver 46-47: c’est le retour de l’espoir,
des certitudes nouvelles, du renouveau de l’Homme; un long texte en
prose: « Il
aveut pôrtè l’ soya dins s’bèsace »,
simple histoire de Pierre le braconnier poursuivi par les gendarmes.
Voici bientôt « Lès
fauves dèl taye- aus-
fréjes et contes
dou tiène- al- bîje »:
neuf textes en prose qui évoquent les deux versants de la vie,
soleil et ombre, avec poésie, sagesse, vérité, humour, tendresse
et réalisme.
En
1957, Willy Bal revient à la poésie et publie «Poques
et djârnons »,
plaies et germes,
souffrance et espoir. Des pages nourries de cette veine paysanne
chère à l’ auteur. Après un hiatus qui semble coïncider avec
son séjour en terre africaine, Willy Bal revient à la poésie
wallonne ainsi que l’ atteste la troisième section des
« Oeuvres
poétiques wallonnes »,
une anthologie de près de 200 pages publiée en 1991
Au
fil des ans Willy Bal, a continué ses travaux de dialectologie et de
linguistique, s’intéressant notamment à la proximité des choses,
aux coutumes, aux métiers ainsi qu’ en témoignent études
et d’articles dont il ne me parait pas possible de citer, ici, le
détail.
Tout
intellectuel qu’il fût,
Willy Bal était resté un homme de la terre et il n’ est pas
étonnant qu’il ait été fort impressionné dans sa jeunesse par
l’ oeuvre de Charles Ferdinand Ramuz au point de consacrer les
vacances qui précédèrent son entrée à l’université à
composer une adaptation en wallon de Jamioulx d’Aline,
un des textes les plus connus du romancier vaudois. Cette adaptation,
il la rangea dans un tiroir, l’ égara pour plus de soixante ans.
Un jour pourtant, à l’ occasion d’une heureuse remise en ordre
de son grenier, il eut le plaisir de retrouver ce « manuscrit
perdu » qu’il relut avec étonnement. Il y apporta une légère
toilette orthographique .
« Aline »
est le recueil numéro 5 de la collection littéraire MicRomania,
Ce volume succèda à
« Warum
Krieg? » encore
un texte de jeunesse, une longue réflexion sur la guerre éditée
par l’ ALWaC. Paru en 2001
aux éditions èl bourdon , « Djon.nèsse
a malvô »
rassemble six proses qui qui ont pour thème la deuxième guerre
mondiale,proses doublées d'une traduction française.
Appelé
dans le vaste monde de la romanité pour des cours, des conférences,
des congrès, des journées d’étude, le professeur Willy Bal a,
certes, beaucoup voyagé. Au total, combien d’expériences
enrichissantes pour un homme qui avait choisi , très tôt, d’aller
vraiment à l’ essentiel.
Car
la sève de ce vrai wallon s’était nourrie ,et ce consciemment
depuis l’enfance, dans l’ attachement profond à sa terre èy’
a lès djins d’ sès djins.
Dans cet héritage, le dialecte figure en première place. Willy Bal,
poète, prosateur, en a tiré des pages personnelles, écrites dans
une langue tantôt délicate, tantôt rude et crue mais toujours pure
et savoureuse et résolument moderne.
Il y aurait tant de choses à dire , encore, tant de témoignages à évoquer qui touchent de près WILLY BAL. Retenons aujourd' hui l’ ampleur de son action, la valeur de son oeuvre souvent récompensée par des prix prestigieux et surtout, remercions le d'avoir été ce qu'il fut: une figure attachante de notre patrimoine littéraire, un Humaniste à l’ écoute du coeur profond de sa race, un wallon parmi les tout grands pour qui rien de ce qui fait le sel et la richesse de notre identité n’était demeuré étranger. Chez lui, le cerveau était tellement près du cœur !
Danielle
Trempont.
Willy
Bal, d’après Roger Foulon, in èl
bourdon
n° 482.
èl
bourdon n°658,
septembre 2013
Merci pour cette biographie très intéressante consacrée à Willy Bal.
RépondreSupprimerL'étude qu'il a entreprise des mots d’origine portugaise en Afrique noire a
dû être une activité singulière!
Cordialement.
Eric Monaux
Merci Eric.Willy Bal était vraiment un grand "Monsieur" et c'est un honneur de l'avoir connu .
SupprimerOn ne peut que te féliciter chère Danielle d'avoir créé un blog cher à
RépondreSupprimernotre cœur, et qui ne peut que toucher les vrais wallons. Et surtout
d'avoir mis à l'honneur notre maître à tous, Monsieur Willy Bal.
Nadine Modolo
Cordialement,
Modolo Nadine
Merci Nadine.C'est toujours un plaisir d'évoquer nos grands auteurs et c'est un honneur de les avoir fréquenté.
Supprimer